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« Me concentrer sur mon bébé m’a donné la force de faire face à la réalité de ma situation »

24 février 2023

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Tchéquie a accueilli environ 500 000 personnes, dont 476 000 sont restées dans le pays. Julia est l’une des plus de 200 mères ukrainiennes qui ont accouché dans une maternité de Prague. Elle explique ce qui lui est arrivé depuis le début du conflit en février 2022. 

Julia Melnyk, 29 ans, vit à Prague avec son petit garçon, Sviatoslav. Le bébé, heureux et en bonne santé, gazouille dans ses bras, et elle le regarde avec amour. Mais les circonstances de sa première année de maternité ont été complètement différentes de ce qu’elle avait envisagé lorsque Julia et son mari ont appris qu’ils allaient être parents en septembre 2021.

« J’exerçais mon métier d’avocate dans une entreprise de construction, et mon époux est détective pour une entreprise de lutte contre la corruption », a-t-elle expliqué. « Nous avions tous deux un bon emploi près de Kiev, et nous avions beaucoup de projets d’avenir. Nous avons été ravis lorsque nous avons appris que j’étais enceinte. »

« En février dernier, j’étais à mon septième mois de grossesse, et je venais de commencer mon congé de maternité. Je me préparais pour la naissance du bébé. Les grands-parents étaient impatients de passer du temps avec leur petit-fils, et je savais que je pouvais compter sur un soutien important au cours des premiers mois. Tout semblait certain, et nous étions sûrs de notre sécurité et du confort futur de notre bébé. Nous planifions notre avenir, et nous avions beaucoup de rêves. »

« Tout a changé lorsque le conflit a éclaté le 24 février. À ce moment-là, nous avons immédiatement compris que c’était la guerre, que c’était sérieux. Nous n’étions dès lors plus sûrs que nos vies soient en sécurité, ni la mienne, ni celle de mon mari, ni celle de notre bébé. Je n’avais pas la certitude de pouvoir recevoir les soins médicaux adéquats pour mettre mon bébé au monde. »

« Mon mari et moi avons décidé ensemble que je devais accoucher dans un endroit sûr où je pourrais bénéficier de soins médicaux appropriés. J’ai décidé de quitter l’Ukraine avec mon amie, ses enfants et sa mère. Lorsque nous sommes partis, il y avait des tirs actifs, et mon mari m’a donné un gilet pare-balles qu’il avait reçu au travail. Quand je l’ai mis par-dessus mon ventre, je n’arrivais pas à croire que c’était réel. C’était tellement différent de la façon dont j’imaginais mes derniers mois de grossesse. »

« Le voyage lui-même était assez effrayant et difficile. On entendait le bruit de l’artillerie partout. Lorsque nous sommes finalement arrivés à la frontière polonaise, il a fallu environ 10 heures pour la traverser en raison d’énormes files d’attente. »

« Nos amis nous ont hébergés pendant les 2 premières semaines. Nous leur en sommes d’ailleurs très reconnaissants. J’avais tellement peur de ce qui allait arriver à mon mari ou à mes parents qui étaient restés à Kiev où les combats étaient très violents. Cela me rendait très nerveuse. »

« Après quelques semaines, nous avons appris que le gouvernement tchèque offrait une protection temporaire aux citoyens ukrainiens fuyant la guerre, et qu’il délivrait des visas et fournissait une assurance maladie. J'allais bientôt donner naissance, et je savais que je devais me concentrer sur l’accouchement ainsi que sur la santé et l’avenir de mon bébé. »

« Il y avait beaucoup de papiers à remplir pour obtenir le visa et m’inscrire à la maternité, mais je savais que ma tâche principale était de m’assurer que je pouvais accoucher en toute sécurité. Me concentrer sur tout cela m’a vraiment aidée à survivre à ce moment-là, et à faire face à la réalité de ma situation. »

« Lorsque j’ai finalement obtenu un rendez-vous à la maternité, j’ai subi les examens et les procédures standard. C’est lors de ma deuxième visite à l’hôpital que j’ai rencontré le docteur Darina. Elle est d’origine ukrainienne, et je me suis immédiatement sentie rassurée lorsque j’ai parlé avec elle, car nous pouvions communiquer correctement et je savais que je pouvais lui faire confiance. Tout le personnel de la maternité a été très professionnel et serviable, ce qui m’a permis de me sentir en sécurité. »

« J’ai eu la chance d’accoucher rapidement et sans complication, le docteur Darina m’ayant soutenue tout au long du processus. Mon bébé était en bonne santé, et nous n’avons pas eu à rester longtemps à l’hôpital. »

« Lorsque je suis sortie de l’hôpital, j’ai dû entreprendre beaucoup de démarches pour enregistrer légalement mon bébé en Tchéquie et en Ukraine, car il est citoyen ukrainien. Mais mes sentiments étaient aussi partagés. J’étais heureuse d’avoir mon bébé, et qu’il soit en sécurité et en bonne santé. Mais en même temps, j’étais seule dans un pays étranger, sans mon mari pour me soutenir, et il n’a même pas eu la chance de voir notre fils. Ma famille était si loin, et j’avais tellement peur de l’avenir. Je ne savais pas ce qui allait arriver à notre maison ou à notre pays. »

« Ce qui était le plus difficile, c’était d’être séparée de mon mari. Mais même s’il n’est pas physiquement présent à mes côtés, il m’apporte un grand soutien. Il n’arrête pas de m’encourager. Il me dit qu’il est heureux que le bébé et moi soyons en sécurité, et que je dois essayer d’être heureuse et optimiste. »

« Mon fils a maintenant 10 mois. Il est fort et en bonne santé. Nous avons ici un merveilleux pédiatre chez qui nous nous rendons pour les consultations. Nous sommes reconnaissants au gouvernement tchèque pour toute l’aide qu’il nous a apportée. Nous sommes en sécurité et à l’aise ici. »

« Mon plus grand souhait pour l’avenir est que la guerre se termine, que je puisse rentrer chez moi et retrouver mon mari. J’ai hâte que mon fils grandisse en sécurité dans notre maison, sans avoir peur des missiles ou sans entendre des coups de feu – sans la guerre. C’est ce que j’espère le plus. »

Soutien de l’OMS en Tchéquie

Depuis le début de la guerre en Ukraine, le bureau de pays de l’OMS en Tchéquie a considérablement intensifié ses opérations afin de soutenir et de renforcer les systèmes de santé nationaux dans le but de dispenser des soins de santé équitables à tous, y compris aux réfugiés. 

Les campagnes de communication et les services destinés aux réfugiés sont aussi adaptés à leur culture, et des informations sont disponibles en ukrainien sur la manière d’accéder aux soins de santé. Si les maladies infectieuses font principalement l’objet des campagnes de communication, l’aide apportée aux réfugiés concerne en premier lieu la santé mentale et le soutien psychosocial. En outre, l’OMS aide des psychologues ukrainiens à dispenser des services de santé mentale aux réfugiés.

L’OMS continue d’apporter son appui au ministère tchèque de la Santé dans la coordination de l’action sanitaire et humanitaire. On mentionnera notamment à cet égard la mise en œuvre d’interventions stratégiques et supplémentaires dans le domaine de la santé mentale ainsi que le soutien apporté aux programmes nationaux de vaccination, aux services de prise en charge du VIH et à la surveillance des maladies ; la fourniture d’équipements médicaux prioritaires sur la base d’évaluations des besoins ; et le renforcement des capacités.