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L’impact de la guerre sur les enfants cancéreux – comment assurer la continuation des soins pour ceux dont la vie en dépend ?

17 mars 2022
Communiqué de presse
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Alors que la guerre s’intensifie en Ukraine, des centaines d’enfants cancéreux, dans tout le pays, ont été contraints de fuir leur logement ou leur lit d’hôpital et d’entreprendre un dangereux voyage dans l’espoir de reprendre le traitement dont ils ont besoin pour survivre.

Leonid (8 ans), qui subit un traitement par chimiothérapie pour une tumeur de la vessie, a été contraint de quitter un hôpital de Kiev alors que les bombardements s’intensifiaient. Avec sa mère, Anna, ils sont partis en quête de sécurité et de soins. « Le trajet a été long et angoissant, et Leonid était terrifié par les obus et les bombes », raconte Anna.

Leonid est arrivé sain et sauf au Centre médical spécialisé pour enfants d’Ukraine occidentale, à Lviv, près de la frontière polonaise, et a repris sa cancérothérapie. Malheureusement, Anna a appris que la tumeur de son fils s’est développée. « Nous voulons nous rendre en Pologne dès que possible pour que notre fils puisse bénéficier d’un traitement normal », dit-elle. « Nous ne voulons pas attendre. Personne ne sait avec certitude ce qui va arriver. »

L’OMS coordonne l’aide sanitaire humanitaire avec ses partenaires, tant sur le territoire de l’Ukraine qu’à ses frontières, et achemine des fournitures, un soutien technique et du personnel d’appoint. L’Organisation met actuellement en place un centre de soutien à l’Ukraine en Pologne et s’efforce de faire en sorte que les pays voisins disposent des infrastructures et des compétences nécessaires pour gérer un afflux massif de réfugiés. Selon des estimations des Nations Unies, plus de 3 millions de personnes auraient fui le pays.

Pour financer une réaction, l’OMS a lancé un appel d’urgence sanitaire en faveur de l’Ukraine. Des organisations locales et internationales se sont lancées dans une course contre la montre pour que les patients atteints d’un cancer de l’enfant puissent reprendre leur traitement.

Des enfants de toute l’Ukraine sont stabilisés au Centre médical spécialisé pour enfants d’Ukraine occidentale, puis transportés en ambulance à la clinique Unicorn Marian Wilemski en Pologne, pour un triage. De là, ils sont envoyés avec des membres de leur famille vers les centres d’oncologie pour enfants en Pologne, ailleurs en Europe ou plus loin encore.

Yulia Nohovitsyna, qui travaille pour une fondation caritative, déclare qu’environ 170 enfants ont déjà bénéficié de ce système d’aiguillage.

L’un de ces enfants est Anastasia, de Kiev. Le 7 mars, elle est arrivée à Hambourg (Allemagne) avec sa mère, Natalia, et a repris son traitement contre une leucémie aigüe lymphoblastique. Cinq jours plus tôt, la mère et la fille avaient fui l’hôpital national spécialisé pour enfants d’Okhmatdyt, qui avait subi des tirs d’artillerie.

« Avec les alarmes, les sirènes et la probabilité d’une destruction de la capitale, il était impossible de continuer le traitement », explique Natalia. « Je suis très reconnaissante à tous ceux qui ont organisé l’évacuation des enfants, et aux médecins qui nous ont emmenées en Allemagne pour le traitement. »

Le cancer fait partie des grands défis posés par la situation d’urgence sanitaire en Ukraine, a déclaré cette semaine le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS. Le docteur Tedros a également souligné l’absence de traitement pour les maladies respiratoires et cardiovasculaires, entre autres problèmes.

Un déferlement de patients


Le Centre médical spécialisé pour enfants d’Ukraine occidentale, qui sert de zone de transit pour les jeunes patients ukrainiens atteints de cancer, doit faire face à l’amenuisement des fournitures et à un afflux de patients malades et souvent traumatisés – en 1 semaine, il y a eu autant d’admissions qu’en 6 mois.

« Nous nous préparons au pire : nous sécurisons les fenêtres, nous ménageons un espace pour évacuer au sous-sol. Mais ce n’est pas une solution adaptée pour nos patients », déclare le docteur Severyn Ferneza, l’un des médecins du centre, en retenant ses larmes lors d’une interview avec l’OMS. « Je n’ose même pas imaginer ce qui se passerait si cet hôpital cesse d’être opérationnel. Personne d’autre ne pourrait gérer cette situation. »

Bien que la chimiothérapie se poursuive, les patients doivent toujours être emmenés en toute hâte dans des abris anti-bombes environ 4 fois par jour, lorsque les sirènes des raids aériens retentissent. Beaucoup d’enfants ont déjà vécu des bombardements dans des villes comme Kharkiv et Kiev, et sont terrifiés par les sirènes. Un psychologue travaille avec eux 2 fois par semaine, mais le personnel de l’hôpital estime que les besoins de tels services sont bien plus importants.

« Le cancer en soi est un problème, mais à cause des thérapies interrompues, du stress et des risques d’infection, des centaines d’enfants pourraient mourir prématurément », déplore le docteur Roman Kizym, qui dirige le Centre. « Nous pensons que ce sont les victimes indirectes de cette guerre. »

Arthur, 6 ans, fait partie des nouveaux arrivants au Centre. Il est atteint d’une leucémie myéloïde aiguë, un cancer du sang. « Nous apprécions d’avoir cette chance de survivre et de poursuivre le traitement », déclare Alina Mykolaivna, la mère du petit garçon. « Si nous avions interrompu le traitement, Arthur aurait fait tous ces blocs de chimiothérapie pour rien. »

Le docteur Kizym loue la coordination internationale qui a déjà permis l’évacuation et le traitement de nombreux patients. « C’est néanmoins un moment difficile », dit-il. « Certains traitements, comme les greffes de moelle osseuse, que je me suis efforcé de rendre accessibles en Ukraine, sont désormais impossibles. Il est impossible de faire venir de la moelle osseuse d’un donneur. »

Le centre de transplantation de l’hôpital est inutilisé, et un ruban d’inauguration datant d’avant le début de la guerre pend à la porte.

L’un des patients du docteur Kizym est Leonid, le petit garçon atteint d’une tumeur de la vessie. Il réagit bien au traitement, explique sa mère, mais semble indifférent. « Il veut rentrer à la maison », dit-elle. « La maison lui manque. »

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Des modifications de forme ont été apportées à cet article le 17 mars 2022 afin de clarifier la déclaration du docteur Roman Kizym.