Almir Pubovic
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Les effets invisibles des inondations : priorité au bien-être mental en Bosnie-Herzégovine

18 octobre 2024
Communiqué de presse
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Le changement climatique intensifie les phénomènes météorologiques extrêmes à l’échelle mondiale. La Bosnie-Herzégovine subit les effets des inondations les plus graves de ces 10 dernières années. Les fortes pluies ont provoqué des inondations catastrophiques, en particulier dans les régions du sud et du centre, dévastant les communautés de Jablanica, Kiseljak, Kreševo, Fojnica et Vareš. La montée des eaux et les glissements de terrain ont détruit les infrastructures, coupé l’accès aux routes et aux voies ferrées essentielles, et ont fait malheureusement plus de 20 victimes, tout en laissant un nombre incalculable de personnes sans domicile ni moyens de subsistance. En outre, face à l’urgence du relèvement physique, il s’avère tout aussi impératif de palier les incidences de cette catastrophe sur la santé mentale des survivants, des sauveteurs et du personnel de santé.

Atteindre les communautés touchées 

À Jablanica, une petite ville située à 60 kilomètres au sud-ouest de Sarajevo, le bénévole Dino Dzevlan a évoqué la rapidité et l’impact de la catastrophe. « Tout s’est passé trop vite pour que l’on puisse réagir, et l’ampleur de cette catastrophe est trop importante pour une petite municipalité comme Jablanica. » 

Malgré le chaos, Dino Dzevlan a salué la résilience de la communauté. « Une fois l’appel lancé à la protection civile, plus de 100 personnes étaient prêtes à apporter leur aide. Nous avons fait tout ce que nous pouvions, du nettoyage des maisons au dégagement des routes, en passant par la distribution de nourriture et d’eau. Dans une telle situation, on ne peut pas attendre plus de la population ordinaire. »

Selon Ramiza Ustovic, une habitante de Buturovic Polje, près de Jablanica, si elle est toujours en vie, c’est grâce à ses voisins. « Je dormais quand tout est arrivé », se souvient-elle.

Cette solidarité est cruciale alors que les efforts de relèvement se poursuivent, mais la tension est évidente. « Nous sommes proches de l’épuisement, et nous avons besoin de toute l’aide possible », a averti Alma Budim Hondo, directrice d’un centre local de soins de santé primaires. 

Dispenser des soins essentiels

En réponse aux inondations dévastatrices, l’OMS a fourni un véhicule tout-terrain, indispensable pour transporter le personnel médical et les patients sur des terrains accidentés, afin que les services de santé essentiels puissent atteindre les personnes dans le besoin, même dans les zones où l’accès a été gravement compromis par la montée des eaux et les glissements de terrain.

L’OMS se tient fermement aux côtés des populations touchées par les inondations et collabore étroitement avec les équipes locales de soins d’urgence pour livrer des fournitures et des équipements médicaux essentiels là où l’on en a le plus besoin. 

Un appel pour un soutien en santé mentale

S’il est primordial de répondre aux besoins physiques immédiats des personnes touchées, il est tout aussi important de reconnaître et de palier les effets psychologiques de ces événements traumatisants, notamment pour le personnel médical, les sauveteurs et les équipes de protection civile qui viennent inlassablement en aide à leurs communautés. Ces personnes dévouées travaillent souvent sous une pression énorme et sont confrontées à des difficultés émotives lorsqu’elles sont témoins de souffrances et de pertes au sein de leur communauté, voire de leur famille. En l’absence d’un soutien adéquat, cette situation peut avoir des conséquences psychologiques graves, et provoquer notamment un syndrome de stress post-traumatique ainsi que des problèmes de santé mentale à long terme. L’épuisement émotionnel, physique et mental est de plus en plus répandu dans le secteur de l’intervention d’urgence. 

Bahrudin Bandic, membre du Service de secours en montagne de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, souligne l’importance du soutien en santé mentale. « On nous a proposé l’accès gratuit à un psychologue », a-t-il expliqué. « Au début, j’ai trouvé cela étrange, puis je me suis rendu compte que c’était vraiment utile. » 

Des organisations telles que l’Association des psychologues de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la Croix-Rouge mobilisent rapidement des équipes pour apporter un soutien psychosocial aux personnes touchées par les inondations, sachant que, sans une intervention rapide, le rétablissement émotionnel peut prendre des années.

Annihiler la stigmatisation autour de la santé mentale

La stigmatisation autour de la santé mentale reste un problème. Nombreux sont ceux qui hésitent à demander de l’aide, craignant d’être jugés, discriminés ou de paraître fragiles, en particulier les personnes qui exercent des métiers à forte pression, notamment dans le secteur des soins de santé et des interventions d’urgence. 

Bahrudin Bandic reconnaît que nombre de ses collègues sont aux prises avec leurs sentiments tout en s’efforçant d’aider les autres. « Nous devons normaliser le soutien en santé mentale », a-t-il souligné. « En tant que société, nous n’avons pas encore l’habitude de consulter un psychologue, même lorsque nous en avons besoin. »

La santé mentale n’est pas un luxe. C’est un élément essentiel du relèvement, en particulier pour ceux qui sont en première ligne. Alors que la Bosnie-Herzégovine se reconstruit après les inondations, il est essentiel d’accorder la priorité au bien-être mental, qu’il s’agisse de la guérison individuelle ou de la résilience à long terme des communautés.

Ces dernières années, la crise climatique a fait payer un tribut de plus en plus lourd à la Région européenne de l’OMS, en influant sur l’intensité des phénomènes météorologiques et leur caractère extrême. L’ampleur des inondations qui ont frappé la Région cette année nous rappelle une fois de plus que les pays doivent impérativement collaborer pour lutter contre le changement climatique et ses effets sur la santé. Cet engagement est repris dans la Déclaration de Budapest, un instrument inédit issu de la Conférence ministérielle sur l’environnement et la santé de 2023.

L’OMS/Europe s’associe aux États membres pour relever ce défi par l’intermédiaire du Bureau régional de l’OMS pour l’Europe, situé à Copenhague (Danemark), et du Centre européen de l’environnement et la santé de l’OMS, situé à Bonn (Allemagne).