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Les subsides pour le tabac, un coup dur pour la production alimentaire durable

30 mai 2023
Communiqué de presse
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Dans certains pays de la Région européenne de l’OMS, la culture du tabac continue d’être subventionnée. Ces paiements incitent les agriculteurs à utiliser de grandes surfaces de terres fertiles pour cultiver du tabac plutôt que des aliments sains, alors qu’il a été démontré que le tabac a un impact négatif sur la santé des personnes et sur l’environnement. Par ailleurs, les devises étrangères obtenues grâce à l’exportation du tabac sont utilisées pour importer des aliments transformés coûteux, et la culture du tabac entraîne l’érosion des sols et la désertification, et contribue à l’insécurité alimentaire.

Les dommages environnementaux causés par la culture du tabac sont notamment la perte irréversible de ressources naturelles précieuses. Lorsque les terres sont défrichées pour la culture du tabac, les forêts, les plantes et les espèces animales sont toutes menacées par la perte de leur habitat. Le tabac réduit la fertilité des sols, ce qui rend les cultures vivrières plus difficiles. Il nécessite également de grandes quantités d’engrais chimiques, qui s’infiltrent dans les sources d’eau avoisinantes, tuant les poissons et contaminant l’eau potable pour les hommes et les animaux. 

« L’abandon du tabac et le choix d’autres cultures présentent des avantages évidents pour les agriculteurs, les entreprises et les pays », déclare le docteur Gauden Galea, conseiller stratégique auprès du directeur régional de l’OMS pour l’Europe. 

« En encourageant la diversification de l’agriculture, on réduit la charge des maladies qui pèse sur les familles d’agriculteurs exposées à des produits chimiques lourds et à la nicotine, et on améliore les revenus et le niveau de vie. En outre, à plus long terme, cela permet d’améliorer la sécurité alimentaire et la durabilité ». 

Supprimer les subventions pour le tabac

En 2020, la Macédoine du Nord a dépensé environ 32 millions de dollars pour les subventions au tabac, un montant disproportionné par rapport à celui consacré à l’élevage, aux vergers, à la production laitière, aux cultures de plein champ et aux cultures maraîchères. Les cultivateurs de tabac de ce pays gagnent moins que le revenu mensuel moyen et, à cause du travail intensif qu’ils doivent fournir, passent la plus grande partie de leur journée à s’occuper des plants. Les conséquences sociales et sanitaires de la culture du tabac sont importantes, car les agriculteurs et leurs familles souffrent des effets de l’empoisonnement à la nicotine provoqué par la poussière de tabac, ce qui augmente les coûts des soins de santé pour les ménages.

D’autres pays des Balkans occidentaux, dont la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro, ont également mis en place des systèmes de subventions pour le tabac. En Suisse, les cultivateurs de tabac ont reçu 32,62 millions de dollars de subventions directes pour la période 2015-2020, tandis qu’en Bulgarie, les subventions nationales aux cultivateurs de tabac équivalent à plus de 3 fois la valeur du tabac produit. Néanmoins, le programme bulgare de développement rural encourage les producteurs des zones rurales à se diversifier en se tournant vers des activités autres que l’agriculture et vers des pratiques agricoles agronomiques qui permettent d’accroître la biodiversité des sols et d’améliorer la structure et la santé de ces derniers.

Certains gros villages du sud-ouest de la Bulgarie, qui étaient autrefois des zones où la culture du tabac était bien établie, ont connu un essor économique ces dernières années. Les agriculteurs de ces régions ont réussi à se reconvertir dans la culture des fruits à coque et des baies ou dans l’élevage et ont abandonné la culture du tabac. Ils ont vu leur niveau de vie augmenter, et le tabac joue désormais un rôle marginal dans la production agricole bulgare.

Soutenir différents moyens d’existence

En Türkiye, le gouvernement a supprimé son programme de subvention du tabac en 2002 et réorienté les fonds vers un programme de soutien aux cultures alternatives. En l’absence de subventions publiques, de nombreux producteurs de tabac n’ont pas été en mesure de maintenir leur production, ce qui a entraîné une diminution du nombre d’agriculteurs cultivant du tabac. 

Selon le ministère de l’Agriculture et de la Sylviculture, ce programme, qui prévoyait un soutien financier pour la culture d’autres plantes et une aide directe en espèces pour compenser la perte de revenus, a entraîné la reconversion de 30 % des terres où l’on cultivait autrefois du tabac. Cela a également entraîné une croissance du tourisme, de la production sous serre et de l’élevage de bétail et de vaches laitières. De plus, de nombreuses personnes ont migré vers les provinces, ce qui a accentué le développement industriel dans ces régions.

Les expériences de pays tels que la Bulgarie et la Türkiye montrent que le passage à d’autres cultures n’est pas seulement possible, mais qu’il peut être rentable et qu’il apporte des avantages sociaux, environnementaux et économiques évidents pour les personnes concernées.