Ces dernières semaines, le déferlement d’histoires utilisant le hastag #metoo (moi aussi) sur les réseaux sociaux a ouvert les yeux du monde entier sur un problème de santé publique important, mais souvent caché. On estime qu’environ 1 femme sur 3 est victime de violences physiques et/ou de sévices sexuels aux mains d’un partenaire intime, ou de violences sexuelles exercées par une autre personne à un moment ou à un autre de sa vie.
La violence à l’égard des femmes – aussi bien physique que sexuelle – constitue une violation flagrante des droits fondamentaux et entraîne à court et à long terme des problèmes de santé physique, mentale, sexuelle et reproductive.
Les statistiques ne peuvent pas être ignorées. Il s’agit d'un problème mondial qui se pose dans tous les milieux, dans tous les secteurs professionnels et dans tous les domaines de la vie. Les victimes de violences sont nos sœurs, nos femmes, nos filles, nos fils, nos amis, nos collègues et nos patients.
Si le déferlement d’histoires de victimes a mis sur le devant de la scène une parole collective autour d’un problème mondial, il est fréquent que les victimes aient encore des difficultés à raconter ce qui leur est arrivé et qu’elles revivent leur traumatisme en le faisant. C’est sur ce point que le système de santé peut jouer un rôle important. Agents de santé: vous aussi (#youtoo) pouvez faire quelque chose pour aider les femmes et toutes les personnes victimes de violences.
Nos obligations en tant qu’agents de santé
Étant donné que la violence à l’égard des femmes, des enfants et des adolescents pousse de nombreuses victimes à consulter des agents de santé, nous devons nous assurer que, où qu’ils soient prodigués, les soins de santé soient justes, respectueux et non discriminatoires. À l’OMS, nous collaborons avec des systèmes de santé du monde entier pour renforcer les soins de santé mis à disposition.
Notre nouveau manuel, Renforcer les systèmes de santé pour les femmes victimes d’actes de violence commis par un partenaire intime ou d’actes de violence sexuelle donne des orientations pratiques sur ce que les systèmes de santé doivent faire pour appuyer les agents formés. Il met en avant les étapes nécessaires pour établir et renforcer l’infrastructure, la prestation de services, les systèmes d’information sanitaire et les réseaux d’orientation visant à accompagner les victimes de violences, entre autres. Il complète le document Lutter contre la violence entre partenaires intimes et la violence sexuelle à l’encontre des femmes: recommandations cliniques et politiques, qui est utilisé pour former les agents de santé aux techniques permettant de reconnaître et d’accompagner les victimes/les survivants.
Reconnaissant que les enfants et les adolescents ont des besoins qui leur sont propres, nous avons également lancé, le mois dernier, des directives intitulées Responding to children and adolescents who have been sexually abused. Ces directives présentent des recommandations visant à garantir que les soins de santé soient centrés sur l’enfant ou l’adolescent et soient axés sur leur sécurité et leur bien-être. Les enfants et les adolescents devraient également recevoir des informations et des services leur permettant de faire des choix concernant leur traitement, les soins de santé qui leur sont prodigués et la façon dont ils sont accompagnés.
Ces deux outils contiennent des principes qui devraient être respectés par l’ensemble des agents de santé lorsqu’ils prennent en charge des victimes.
Les agents de santé devraient éviter d’imposer aux victimes de raconter leur histoire à plusieurs reprises. Écoutez toujours avec attention lorsque les victimes racontent leur histoire et n’interprétez ni ne jugez pas leur témoignage.
En premier lieu, il faut toujours soigner sans discrimination aucune. Cela implique de reconnaître que la discrimination dont souffre une femme peut prendre différentes formes: en premier lieu parce qu’elle est une femme, mais également en raison de sa race, de son appartenance ethnique, de sa classe, de son milieu socioéconomique, de sa caste, de son orientation sexuelle, de sa religion, de son handicap ou d’une autre caractéristique, ainsi qu’en raison de son statut de victime de violence.
En second lieu, il ne faut jamais aborder la question de la violence exercée par le partenaire à moins que la femme soit seule. Même si elle est en compagnie d’une autre femme, celle-ci pourrait être la mère ou la sœur d’un auteur de violence. Si vous lui posez des questions sur des actes de violence, faites-le avec empathie et sans jugement. Utilisez toujours un vocabulaire approprié et adapté à la culture et à la communauté dans lesquelles vous exercez, étant donné que certaines femmes pourraient se sentir gênées par l’utilisation des mots «violence» et «sévices».
Enfin, n’oubliez pas le principe consistant à ne pas nuire. Les agents de santé devraient éviter d’imposer aux victimes de raconter leur histoire à plusieurs reprises. Écoutez toujours avec attention lorsque les victimes racontent leur histoire et n’interprétez ni ne jugez pas leur témoignage.
Un monde sans violence en ligne de mire
Le Plan d’action mondial imagine un monde où les femmes et les jeunes filles ne sont victimes d’aucune forme de violence et de discrimination, où leur santé et leur bien-être sont protégés et défendus, où leurs libertés et leurs droits fondamentaux sont pleinement respectés, où l’égalité entre les hommes et les femmes est la norme et où les femmes ont pris leur destin en main.
Les agents de santé ont la responsabilité de protéger et d’appuyer les victimes de violence, ainsi que d’éviter la survenue d’autres actes de violence. Alors que les histoires accompagnées du mot-clé #metoo continuent d'affluer, il est temps pour vous aussi (#youtoo) d’agir.