Excellences,
Je tiens à vous remercier tous, et en particulier la Présidence croate et le Haut-Représentant, Josep Borrell, de me donner la possibilité de m’adresser à vous aujourd’hui.
Je vais d’abord faire rapidement le point de la situation.
Selon les chiffres de ce matin, 7 millions de cas de COVID-19, dont près de 400 000 mortels, au total, ont été notifiés à l’OMS.
Le nombre de cas continue à baisser en Europe – et c’est une bonne nouvelle – mais, à l’échelle mondiale, on constate plusieurs évolutions inquiétantes.
Au cours des 10 derniers jours, plus de 100 000 cas de COVID-19 ont été notifiés sur 9 jours. Hier, plus de 136 000 cas ont été signalés. C’est le chiffre le plus élevé enregistré jusqu’à présent pour une seule journée.
Le nombre de cas augmente en Amérique centrale et en Amérique du Sud, dans la Méditerranée orientale, en Asie du Sud-Est et en Afrique.
De nombreux pays ont besoin d’aide pour subvenir à leurs besoins immédiats, atténuer les conséquences de la pandémie et se relever.
Comme vous le savez, cette pandémie a un impact sur la vie des gens et sur leurs moyens de subsistance, et nous devons nous préoccuper de ces deux aspects.
Mes amis, la route est encore longue.
Cela fait maintenant plus de quatre mois que j’ai déclaré que la COVID-19 constituait une urgence sanitaire mondiale. Depuis le 30 janvier dernier, date à laquelle nous avons déclaré le plus haut niveau d’urgence, la pandémie a bouleversé les systèmes de santé, les sociétés et les économies en Europe et partout ailleurs dans le monde.
Comme la COVID-19 touche presque tous les secteurs de nos sociétés, nous devons adopter, pour y faire face, une approche impliquant l’ensemble de la société et des pouvoirs publics, comme le font de nombreux gouvernements d’Europe.
Le développement est, par définition, un domaine pluridisciplinaire, dont la santé est un élément essentiel. Mais la COVID-19 nous a rappelé que la santé n’est pas non plus possible dans le vide.
Je tiens à remercier l’Union européenne et ses États membres pour leur rôle moteur dans l’appui en faveur de la lutte contre la COVID‑19 et de l’OMS, et pour les mesures prises très tôt afin d’aider les pays vulnérables. Merci infiniment.
Ceci a permis de fournir des articles essentiels, des conseils techniques, une formation et des moyens supplémentaires aux États Membres dont le système de santé est fragile, notamment en Europe de l’Est, en Afrique, dans les Caraïbes et dans le Pacifique.
Bien entendu, l’Union européenne et ses États membres sont partenaires de l’OMS depuis longtemps et leur contribution représente 25 % du budget de l’OMS.
Nous saluons la proposition récemment faite par la Commission de mobiliser des fonds supplémentaires en 2020 pour soutenir la riposte mondiale, et le projet de budget pour 2021-2027. Une fois encore, merci infiniment.
Ceci souligne l’engagement de l’Union européenne envers ses partenaires mondiaux, par le biais du renforcement de l’aide au développement et de l’aide humanitaire, dans le cadre du développement du multilatéralisme.
En outre, nous remercions sincèrement les dirigeants de l’Union européenne d’avoir soutenu la résolution consensuelle sur la COVID‑19 pendant l’Assemblée mondiale de la Santé le mois dernier. Vous êtes parvenus à réunir le monde. C’était très important pour faire face à la pandémie.
Nous appliquons la résolution et assurons le suivi des 10 mesures à prendre. J’espère pouvoir vous informer régulièrement à ce sujet.
L’un des éléments essentiels de la résolution de l’Assemblée mondiale de la Santé est le renforcement des capacités de mise au point, de production et de distribution pour assurer un accès équitable à des vaccins et à des médicaments contre la COVID-19.
C’est pourquoi nous sommes particulièrement reconnaissants envers la Présidente von der Leyen et la Commission européenne, qui ont été des partenaires formidables lors du lancement du Dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 et pour faire progresser son utilisation.
Nous collaborons très étroitement avec le Cabinet de la Présidente von der Leyen afin de doter le pôle du Dispositif, hébergé à l’OMS, de tous les moyens nécessaires pour coordonner et soutenir le fonctionnement du Dispositif, et j’espère vivement que le partenariat avec la Commission et le leadership de la Commission se poursuivront pour que nous atteignions notre but commun de l’accès équitable. Et je vous remercie également des US $8 milliards vous avez mobilisés en un seul engagement, en faveur du Dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19.
Ce Dispositif et le Groupement d’accès aux technologies contre la COVID-19 sont essentiels pour que les populations les plus vulnérables soient protégées.
Je voudrais également remercier l’ancien Président Juncker, avec qui nous avons collaboré très étroitement.
Les conséquences de la pandémie de COVID-19 vont bien au-delà de la pandémie. La pandémie réduit à néant un grand nombre des progrès que nous avions accomplis dans la lutte contre certaines maladies parmi les plus terribles du monde.
La perturbation des campagnes de vaccination contre la poliomyélite, le choléra, la rougeole, la méningite et le HPV fait courir un risque à des centaines de millions de personnes.
En outre, 80 millions d’enfants risquent de ne pas être vaccinés contre la tuberculose, la pneumonie et la diarrhée.
Le danger que la famine succède à la pandémie de COVID-19 est tout à fait réel. Le Programme alimentaire mondial estime que, dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, le nombre de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë va presque doubler, pour atteindre 265 millions d’ici à la fin de l’année 2020.
L’augmentation de la prévalence de l’émaciation dans les pays à revenu faible ou intermédiaire pourrait être terrible et atteindre 20 %.
Les services vitaux pour la nutrition doivent être maintenus dans tous les pays, y compris le traitement de la malnutrition aiguë, la supplémentation en vitamine A pour les enfants et la supplémentation en micronutriments pour les femmes enceintes ou allaitantes.
À présent, il est essentiel que nous tirions les enseignements de la pandémie de COVID-19, qui nous rappelle une fois encore que la solidité d’une chaîne se mesure au niveau de son maillon faible.
La pandémie a encore montré que la sécurité sanitaire mondiale et les systèmes de santé nationaux et communautaires sont intimement liés, notamment en ce qui concerne les chaînes d’approvisionnement équitable et les personnels de santé.
Comme cette pandémie l’a cruellement démontré, tenter d’économiser de l’argent en négligeant les systèmes essentiels qui protègent la santé, l’environnement et la société est une fausse économie.
Aujourd’hui, la facture est bien plus élevée.
La préparation et les systèmes de santé solides ne sont pas un coût mais un investissement.
Je tiens une nouvelle fois à remercier l’Union européenne pour son partenariat à toute épreuve et, à cet égard, j’ai trois demandes à formuler :
Premièrement, nous devons investir encore davantage pour renforcer les systèmes de santé et améliorer la résilience, en particulier dans les pays et les communautés dont le système de santé est fragile.
Deuxièmement, alors que le monde s’attache à lutter contre la COVID-19, il est essentiel de continuer à soutenir d’autres initiatives humanitaires et de développement, comme notre partenariat avec l’Union européenne sur le renforcement des systèmes de santé pour la couverture sanitaire universelle, désormais en place dans 115 pays.
Troisièmement, nous devons mieux reconstruire.
Des démarches telles que l’Initiative de l’Union européenne pour le relèvement mondial et la stratégie de l’UE pour l’Afrique peuvent permettre de combler les lacunes dans les secteurs sociaux et de pallier la fragilité des systèmes de santé, non seulement pendant la crise actuelle mais aussi à long terme.
Nous avons récemment publié le Manifeste de l’OMS pour un monde en meilleure santé après la COVID-19, qui propose six mesures clés en faveur d’un monde en meilleure santé, plus juste et plus soucieux de l’écologie, conformément au Nouveau Pacte vert de l’Union européenne.
Enfin, je vous demande aussi de continuer à soutenir les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Je me suis récemment entretenu avec le Cyril Ramaphosa, Président de l’Afrique du Sud, qui préside actuellement l’Union africaine, avec Mia Mottley, Première ministre de la Barbade, qui préside actuellement la Communauté des Caraïbes, et avec Kausea Natano, Premier ministre de Tuvalu, qui préside actuellement le Forum des îles du Pacifique. Tous les trois m’ont fait part d’une pénurie aiguë de fournitures. Bien entendu, nous essayons de les aider grâce au soutien que vous nous apportez. Mais ils me signalent tout de même d’importantes lacunes. Il serait très important que l’Union européenne s’intéresse aux pays ACP – d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Nous faisons de notre mieux pour satisfaire ces demandes. Mais il faut en faire davantage, et j’espère que vous renforcerez votre soutien, notamment pour ces trois régions. Merci encore de votre soutien et de votre engagement.
Comme je l’ai dit, même si la situation s’améliore en Europe, elle s’aggrave à l’échelle mondiale. La route est encore longue et nous continuerons à nous adresser à vous pour obtenir un soutien.
Comme vous le savez, s’il y a une chose que cette pandémie nous a apprise, c’est l’humilité. L’humilité de croire que nous avons besoin les uns des autres pour combattre ce dangereux virus.
Et Josep, comme vous l’avez si justement dit au cours de l’Assemblée mondiale de la Santé, vous avez réuni le monde. Et je veux que l’Union européenne continue à tenter de convaincre les États-Unis d’Amérique et la Chine de travailler ensemble. Nous n’avons pas besoin d’affrontement, nous avons besoin de solidarité. Le monde ne pourra venir à bout de ce dangereux virus que s’il s’unit.
Je vais être franc avec vous. Je suis vraiment très inquiet car nous ne pouvons pas battre ce virus si le monde est divisé. Nous avons besoin de solidarité, d’abord entre les grands acteurs. Je suis tout à fait d’accord avec vous, Josep, quand vous dites que les États-Unis d’Amérique doivent être assis autour de la table. Ils devraient être avec nous.
C’est en étant tous unis que nous pourrons venir à bout de ce virus. Autrement, l’OMS pense que si le monde est divisé, le virus continuera à faire de plus en plus de ravages.
J’espère donc que, comme vous l’avez fait pendant l’Assemblée, vous continuerez à tenter de convaincre les deux puissances de travailler ensemble et à réunir le reste du monde afin que nous combattions ce dangereux virus à l’unisson. Faute de quoi, le virus continuera à faire des ravages.
Merci encore et j’attends avec intérêt notre débat.
Merci infiniment.