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D’après l’OMS, de nombreuses complications de la grossesse ne sont ni détectées ni traitées

Une nouvelle étude met en lumière les principales causes de décès maternels

8 mars 2025
Communiqué de presse

L’hémorragie (saignements graves et abondants) et les troubles hypertensifs (comme la prééclampsie) sont les principales causes de décès maternels dans le monde, selon une nouvelle étude publiée aujourd’hui par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Respectivement, ces affections sont responsables d’environ 80 000 et 50 000 décès en 2020 – la dernière année pour laquelle des estimations publiées (résumé en français) sont disponibles – ce qui souligne que de nombreuses femmes n’ont toujours pas accès à des traitements vitaux et à des soins efficaces pendant et après la grossesse et l’accouchement.

Publiée dans le Lancet Global Health, cette étude est le premier document mondial publié par l’OMS sur les causes de décès maternels depuis l’adoption des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies en 2015. En plus de présenter les causes obstétriques directes, elle montre que d’autres problèmes de santé, y compris les maladies infectieuses et chroniques comme le VIH/sida, le paludisme, l’anémie et le diabète, sont à l’origine de près d’un quart (23 %) de la mortalité liée à la grossesse et à l’accouchement. Ces affections, qui, souvent, ne sont ni détectées ni traitées tant que des complications majeures ne sont pas survenues, aggravent les risques et compliquent les grossesses pour des millions de femmes dans le monde.

« Il est essentiel de comprendre pourquoi les femmes enceintes et les mères meurent si l'on veut s’attaquer à la crise mondiale persistante de la mortalité maternelle et garantir aux femmes les meilleures chances possibles de survivre à l’accouchement », a déclaré la Dre Pascale Allotey, Directrice du Département Santé sexuelle et reproductive, et recherche à l’OMS et du Programme spécial de recherche, de développement et de formation à la recherche en reproduction humaine (HRP) des Nations Unies. « Il s’agit également d’un immense problème d’équité au niveau mondial : les femmes, partout, ont besoin de soins de qualité reposant sur des bases factuelles, avant, pendant et après l’accouchement et des efforts doivent être déployés pour prévenir et traiter d’autres affections sous-jacentes qui mettent leur santé en péril. »

En 2020, d’après les estimations, il y avait eu au total 287 000 décès maternels, soit un décès toutes les deux minutes. Cette nouvelle étude de l’OMS indique que les hémorragies, qui surviennent principalement pendant ou après l’accouchement, sont responsables de près d’un tiers (27 %) de la mortalité maternelle ; la contribution de la prééclampsie et des autres troubles hypertensifs se monte à 16 %. La prééclampsie est une maladie grave caractérisée par une hypertension artérielle, qui peut entraîner des hémorragies, des accidents vasculaires cérébraux, des défaillances d’organes et des convulsions si elle n’est pas traitée ou si elle est traitée trop tardivement.

Il existe d'autres causes directes : sepsis et infections ; embolie pulmonaire; complications des fausses couches et des avortements provoqués – y compris les grossesses extra-utérines et les problèmes liés aux avortements non sécurisés – ou encore complications et blessures anesthésiques survenues pendant l’accouchement.

Les résultats soulignent la nécessité de renforcer les aspects clés des soins de maternité, notamment les services prénatals, qui permettent de détecter les risques dès le début de la grossesse et de prévenir les complications graves ; les services vitaux d’obstétrique, qui permettent de prendre en charge les urgences critiques liées à l’accouchement, comme l’hémorragie ou l’embolie ; et les soins postnatals. La plupart des décès maternels surviennent pendant ou peu après l’accouchement, ce qui en fait un moment critique pour sauver des vies. Cependant, environ un tiers des femmes – principalement dans les pays à faible revenu – ne bénéficient toujours pas des consultations postnatales essentielles dans les premiers jours suivant l’accouchement. Au niveau de la population, des interventions préventives plus larges pourraient aider à réduire la prévalence des problèmes de santé sous-jacents – comme les maladies non transmissibles et la malnutrition – qui majorent les risques chez les femmes.

« Souvent, ce n’est pas un seul facteur, mais plutôt de nombreux facteurs interdépendants qui contribuent aux décès de femmes pendant ou après la grossesse – la prééclampsie, par exemple, peut augmenter considérablement la probabilité d’hémorragie ainsi que d’autres complications susceptibles de survenir même longtemps après l’accouchement », a déclaré la Dre Jenny Cresswell, Scientifique à l’OMS et auteure de l’article. « Il a été prouvé qu’une approche plus globale de la santé maternelle donne aux femmes les meilleures chances de vivre une grossesse et un accouchement en bonne santé, et de bénéficier d’une qualité de vie durable après l’accouchement – les systèmes de santé doivent être en mesure de les soutenir à différentes étapes de la vie. »

L’étude s’appuie sur des données nationales communiquées à l’OMS, ainsi que sur des études évaluées par des pairs. Pour certaines causes, les données restent limitées. En particulier, les auteurs appellent à ce que davantage de données soient mises à disposition sur le suicide maternel, pour lequel on trouve des données pour 12 pays seulement. En outre, la plupart des pays ne font pas rapport sur les décès maternels tardifs (ceux qui surviennent dans l’année qui suit l’accouchement), bien que plusieurs affections puissent entraîner des risques qui perdurent bien après l’accouchement lui-même. Après l’accouchement, de nombreuses femmes ont du mal à accéder aux soins de suite, y compris au soutien en santé mentale.

L’OMS s’attache à renforcer l’accès à des services respectueux et de haute qualité tout au long du continuum allant de la grossesse (en anglais) et de l’accouchement (en anglais) jusqu'aux soins postnatals, moyennant des travaux de recherche et des lignes directrices fondées sur des données factuelles. En 2024, l’OMS et ses partenaires ont lancé une Feuille de route mondiale pour lutter contre l’hémorragie du post-partum, qui définit les principales priorités pour s’attaquer à cette cause majeure de mortalité maternelle.

Toujours en 2024, les 194 pays de l’Assemblée mondiale de la Santé ont adopté une résolution (en anglais) dans laquelle ils s’engagent à renforcer la qualité des soins avant, pendant et après l’accouchement. Pour galvaniser les énergies, la Journée mondiale de la santé 2025 – qui marque le début de la période de cinq ans précédant l’échéance des objectifs de développement durable (ODD) – mettra l’accent sur la santé maternelle et néonatale. La campagne appellera à une intensification majeure des efforts pour garantir l’accès à des soins de haute qualité et éprouvés pour les femmes et les nourrissons, en particulier dans les pays les plus pauvres et les situations de crise où la grande majorité des décès se produisent. Au-delà de la survie, la campagne mettra insistera aussi sur la nécessité d’accorder une plus grande attention à la santé des femmes, y compris les soins postnatals et le soutien postnatals.

À propos

L’étude, intitulée Global and regional causes of maternal deaths 2009-2020: a WHO systematic analysis (Causes mondiales et régionales de décès maternels 2009-2020 : une analyse systématique de l’OMS), met à jour une analyse précédente, réalisée en 2014, qui couvrait la période 2003-2009. L'analyse précédente montrait également que les hémorragies étaient responsables de la plus grande part des décès (27 %).
https://www.thelancet.com/journals/langlo/article/PIIS2214-109X(24)00560-6/fulltext

Les données ont été identifiées par trois voies principales : la base de données de l’OMS sur la mortalité ; les rapports publiés par les États Membres de l’OMS (base de données du Groupe interorganisations pour l’estimation de la mortalité maternelle, ou MMEIG) ; et des articles de revues identifiés via des bases de données bibliographiques. Les causes de décès maternels sont regroupées en catégories alignées sur le codage de la Classification internationale des maladies-mortalité maternelle (CIM-MM) : avortement (lié à une fausse couche, à une grossesse extra-utérine et à un avortement provoqué), embolie, hémorragie, troubles hypertensifs, sepsis lié à la grossesse, autres causes directes et indirectes décrites ci-dessus.

De nouvelles estimations du nombre total de décès maternels, y compris des données mondiales, régionales et nationales, seront publiées en avril 2025 et couvriront la période 2000-2023.