OMS / Fanjan Combrink
Des agents de santé attendent à côté de flacons de vaccins, notamment contre le paludisme, la poliomyélite, le tétanos, la diphtérie et le rotavirus, au centre de santé de Kawale, dans la région rurale de Lilongwe (Malawi).
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Une meilleure utilisation des vaccins pourrait réduire l’utilisation d’antibiotiques de 2,5 milliards de doses par an, selon l’OMS

Une augmentation des investissements dans les vaccins permettrait d’éviter des décès dus à la résistance aux antimicrobiens (RAM), de réduire l’usage des antibiotiques et de réaliser des économies dans le traitement des infections résistantes

10 octobre 2024
Communiqué de presse
Genève

D’après un nouveau rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les vaccins contre 23 agents pathogènes (hormis N. gonorrhoeae) permettraient de réduire de 22 % le nombre de doses d’antibiotiques nécessaires dans le monde chaque année, soit 2,5 milliards de doses journalières définies, venant ainsi appuyer les efforts mondiaux de lutte contre la RAM. Si certains de ces vaccins sont déjà disponibles, bien que sous-utilisés, d’autres devront être mis au point et mis sur le marché dès que possible.

On parle de résistance aux antimicrobiens (RAM) lorsque les bactéries, les virus, les champignons et les parasites ne réagissent plus aux médicaments antimicrobiens, augmentant la gravité des pathologies, le risque de maladie et de décès et la propagation d’infections difficiles à traiter. La RAM est due en grande partie à l’utilisation abusive et excessive des antimicrobiens, mais dans le même temps, de nombreuses personnes dans le monde n’ont pas accès aux antimicrobiens essentiels. Chaque année, au niveau mondial, près de 5 millions de décès sont associés à la RAM.

Les vaccins sont un pilier de l’action menée en vue de réduire la RAM. Ils préviennent les infections, réduisent le recours aux antimicrobiens et leur usage excessif et ralentissent l’émergence et la propagation des agents pathogènes pharmacorésistants.

Le nouveau rapport s’appuie sur une étude de l’OMS (en anglais) publiée dans BMJ Global Health l’année dernière. D’après ces estimations, les vaccins déjà employés contre la pneumonie à pneumocoque, Haemophilus influenzae de type B (Hib, une bactérie responsable de la pneumonie et de la méningite) et la typhoïde pourraient permettre d’éviter chaque année jusqu’à 106 000 décès associés à la RAM. Chaque année également, 543 000 autres décès associés à la RAM pourraient être évités à mesure que de nouveaux vaccins contre la tuberculose et Klebsiella pneumoniae seront mis au point et déployés à l’échelle mondiale. Pour mémoire, de nouveaux vaccins antituberculeux font actuellement l’objet d’essais cliniques tandis qu’un vaccin contre Klebsiella pneumoniae en est aux premiers stades de développement.

« La lutte contre la résistance aux antimicrobiens commence par la prévention des infections et, dans ce domaine, les vaccins sont parmi les outils les plus efficaces », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS. « Mieux vaut prévenir que guérir : si l’on veut sauver des vies et rompre la spirale de la RAM, il faut absolument amplifier l’accès aux vaccins existants et en mettre au point de nouveaux contre les maladies graves comme la tuberculose. »

Les vaccins sont essentiels pour prévenir l’infection

Les personnes vaccinées présentent moins d’infections et sont protégées contre les complications potentielles des infections secondaires qui peuvent nécessiter des médicaments antimicrobiens ou entraîner une admission à l’hôpital. Le rapport présente une analyse de l’impact des vaccins déjà homologués ainsi que des vaccins à divers stades de mise au point.

Chaque année :

  • les vaccins contre Streptococcus pneumoniae pourraient permettre d’économiser 33 millions de doses d’antibiotiques si l’objectif du Programme pour la vaccination à l’horizon 2030 tendant à vacciner 90 % des enfants du monde et des adultes concernés était atteint ;
  • ceux contre la fièvre typhoïde, d’économiser 45 millions de doses d’antibiotiques, si on accélérait leur introduction dans les pays à forte charge de morbidité ;
  • ceux contre le paludisme à Plasmodium falciparum, d’économiser jusqu’à 25 millions de doses d’antibiotiques (ceux-ci étant souvent utilisés à mauvais escient contre cette maladie) ;
  • ceux contre la tuberculose, d’économiser entre 1,2 et 1,9 milliard de doses d’antibiotiques – ce qui représente une part importante des 11,3 milliards de doses utilisées chaque année contre les maladies couvertes dans ce rapport et aurait donc les plus grandes retombées.

Les vaccins pourraient réduire fortement les coûts économiques majeurs de la RAM

À l’échelle mondiale, les coûts hospitaliers associés au traitement des agents pathogènes résistants évalués dans le rapport seraient de 730 milliards USD par an. Si des vaccins pouvaient être déployés contre tous les agents pathogènes évalués, un tiers des coûts hospitaliers associés à la RAM serait effacé.

Une démarche globale, centrée sur la personne et appliquée à l’ensemble des systèmes de santé est nécessaire pour prévenir, diagnostiquer et traiter les infections. Elle tient dûment compte du fait que la vaccination est essentielle pour prévenir la RAM et qu’elle est particulièrement efficace lorsqu’elle est associée à d’autres interventions.

À la 79e réunion de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la RAM, le 26 septembre, les dirigeants mondiaux ont approuvé une déclaration politique s’engageant en faveur d’un ensemble clairement défini d’objectifs et de mesures à prendre, notamment la réduction de 10 % du nombre de décès humains, estimés à 4,95 millions, associés à la RAM par an d’ici à 2030. La déclaration met l’accent sur des aspects clés, notamment l’importance de l’accès aux vaccins, aux médicaments, aux traitements et aux produits de diagnostic, tout en appelant à la mise en place de mesures d’incitation et de mécanismes de financement afin de stimuler la recherche en santé, l’innovation et le développement multisectoriels en matière de lutte contre la RAM.


Le rapport, intitulé Estimating the impact of vaccines in reducing antimicrobial resistance and antibiotic use (Estimation de l’impact des vaccins sur la réduction de la résistance aux antimicrobiens et de l’utilisation des antibiotiques), présente une évaluation du rôle des vaccins dans la réduction de la RAM et présente aux principales parties prenantes des recommandations pour renforcer l’impact des vaccins sur la RAM. Il évalue 44 vaccins ciblant 24 agents pathogènes : 19 bactéries, quatre virus et un parasite. Les infections peuvent entraîner de multiples syndromes et varier selon les groupes d’âge ; ainsi, dans plusieurs cas, l’impact sur la RAM de plusieurs vaccins a été évalué pour un même agent pathogène.

Les agents pathogènes couverts sont les suivants : Acinetobacter baumannii, Campylobacter jejuni, Clostridioides difficile, Enterococcus faecium, Escherichia coli entérotoxinogène (ETEC), Escherichia coli pathogène extra-intestinal (ExPEC), Streptococcus du groupe A (GAS), Haemophilus influenzae de type B (Hib), Helicobacter pylori, Klebsiella pneumoniae, Mycobacterium tuberculosis, Neisseria gonorrhoeae, Salmonella non typhique, Pseudomonas aeruginosa, Salmonella paratyphique A, Salmonella typhique, Shigella, Staphylococcus aureus, Streptococcus pneumoniae, Plasmodium falciparum (paludisme), grippe, norovirus, rotavirus, virus respiratoire syncytial (RSV).

Une dose journalière définie est la dose d’entretien moyenne présumée par jour pour un antibiotique utilisé pour son indication principale chez l’adulte.

Note aux rédactions

Le 24 octobre 2023, la première phrase de ce communiqué de presse a été corrigée comme indiqué ci-dessous.

La phrase était rédigée comme suit dans la version originale du communiqué de presse :

D’après un nouveau rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les vaccins contre 24 agents pathogènes permettraient de réduire de 22 % le nombre de doses d’antibiotiques nécessaires dans le monde chaque année, soit 2,5 milliards de doses journalières définies, venant ainsi appuyer les efforts mondiaux de lutte contre la RAM.

Elle a été corrigée ainsi :

D’après un nouveau rapport de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les vaccins contre 23 agents pathogènes (hormis N. gonorrhoeae) permettraient de réduire de 22 % le nombre de doses d’antibiotiques nécessaires dans le monde chaque année, soit 2,5 milliards de doses journalières définies, venant ainsi appuyer les efforts mondiaux de lutte contre la RAM.